Quelles seront les conséquences de la proposition de loi fin de vie sur les personnes porteuses de handicap, en particulier de déficience intellectuelle ? Il y a trois manières de réfléchir à cette question. La première est difficile. La deuxième est gênante. La troisième est très simple. Toutes les trois sont alarmantes et mènent à une conclusion : le vote d’un amendement visant à exclure ces personnes du dispositif légal de mort administrée est une urgence absolue.
La première manière consiste à étudier le texte de loi pour essayer de prévoir théoriquement ses conséquences. La démarche est difficile car le texte est complexe et contradictoire. Il prévoit certes que la personne doit être « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée » et précise qu’« une personne dont une maladie altère gravement le discernement (…) ne peut pas être regardée comme manifestant une volonté libre et éclairée ». Mais cette condition est subjective et sujette à interprétation. L’an dernier, d’ailleurs, un amendement prévoyant d’exclure explicitement du dispositif euthanasique les personnes porteuses de déficience intellectuelle a été rejeté au motif que cela représenterait une discrimination pour ces personnes – ce qui confirme implicitement qu’elles pourront bien être euthanasiées.
La proposition de loi prévoit, de plus, la possibilité d’euthanasier une personne sous tutelle, alors que le principe même de cette protection juridique est l’impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts. On peut donc affirmer que la proposition de loi actuelle, par-delà ses contradictions, ouvre la possibilité d’euthanasier une personne porteuse de déficience intellectuelle. La vulnérabilité de ces personnes, leurs difficultés d’expression et de compréhension, leur dépendance affective et leur caractère facilement influençable sont passés sous silence. Le texte repose sur le postulat d’une autodétermination sans faille et sans limite.
Nous, parents et proches de personnes porteuses de déficience intellectuelle, connaissons ces fragilités que nous entourons quotidiennement de nos soins. L’utopie d’un choix « libre et éclairé » de mourir, pour nos proches, nous semble un manque de sagesse et d’humanité dont les conséquences seront tragiques.
La deuxième manière consiste à analyser l’actualité française récente au sujet de la fin de vie des personnes porteuses de déficience intellectuelle. La démarche est gênante et demande un certain courage pour regarder en face une réalité qui dérange. Le 7 janvier 2023, Joël G., porteur de trisomie 21, est décédé au centre hospitalier d’Angoulême (cf. Trisomie 21 : un médecin accusé d’« homicide volontaire » après une « sédation profonde »).
Source : www.genethique.org
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Les discussions parlementaires en commission sont déjà bien avancées sur la fin de vie, et elles ne sont pas rassurantes. Il y a urgence à protéger les personnes vulnérables et en situation de handicap d’une loi qui porterait gravement atteinte à leur dignité.